NATYF TV, une initiative télévisuelle d’avenir au Québec - New Canadian Media
Jean-Yves Roux, Kevin Calixte, et Nancy Dubuisson, trois des visages de la chaîne NATYF TV, dédié à créer une télévision à l’image de la diversité culturelle au Québec. Photos : Courtoisie
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NATYF TV, une initiative télévisuelle d’avenir au Québec

NATYF TV propose une télévision généraliste sous l’angle de la diversité. Son ajout au service numérique de base pourrait être déterminant pour la télévision québécoise.

Lancée en 2018, NATYF TV se dédie à créer une télévision à l’image de la diversité culturelle au Québec. Jusqu’à maintenant diffusée en tant que chaîne spécialisée dans l’offre payante de Bell Média, elle a entrepris auprès du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) une démarche afin d’être accessible gratuitement à l’ensemble des personnes abonné.e.s au câble au Québec.

Un combat qu’elle a mis en œuvre en dépit de l’opposition des principaux câblodistributeurs. Après avoir fait une défense rigoureuse du rôle indispensable de son travail, c’est avec optimisme que l’équipe de la jeune chaîne attend la décision du CRTC.

« L’audience est fermée et la perspective d’une consultation publique de plusieurs mois est écartée, c’est-à-dire que les commissaires considèrent qu’ils ont assez d’éléments pour terminer leur analyse », explique Jean-Yves Roux, président et fondateur de NATYF TV. « Nous croyons que c’est de bon augure pour la suite du dossier au CRTC ».

« Nous voulons permettre aux créateur.ice.s de la nouvelle génération de produire une télévision à l’image de la diversité du Québec », affirme de sa part Nancy Dubuisson, directrice de la programmation de NATYF. «Il s’agit de notre mission et avec la licence, nous voulons nous donner les moyens de la mener à terme ».

C’est le 10 janvier qu’a eu lieu la dernière réunion des commissaires du CRTC à propos du dossier de NATYF TV. La décision devrait être rendue d’ici quelques mois par le CRTC.

Le processus d’approbation pour être inclus dans le bloc de services de base implique une démonstration de la « contribution exceptionnelle » de la chaîne. Elle doit ainsi correspondre à différents critères en relation avec la Loi sur la radiodiffusion, notamment faire la preuve de la valeur de son travail, que celui-ci reflète les communautés qu’elle dessert et « qu’il existe un besoin de nature exceptionnelle du public cible pour le service qu’elle propose », comme l’explique sur son site le CRTC.

NATYF TV propose une télévision généraliste qui se fait sous l’angle de la diversité. Pour l’instant réservée à un public restreint, elle vise avec la licence à se doter d’une vitrine et d’un budget dignes de son mandat.

Au moment de son entrée en ondes comme chaîne publique, la chaîne deviendrait accessible aux 2,26 millions de foyers québécois disposant d’un abonnement au câble. Bien sûr, cette situation favorise aussi l’obtention de revenus publicitaires. Par ailleurs, la licence implique un versement annuel par abonnement – dans le cadre de la demande de la chaîne, de 0,12 $ par foyer – à NATYF TV. 

Alors, il s’agit de nouveaux horizons qui se trouvent possiblement sur le point de s’ouvrir pour la télévision au Québec.

À l’épreuve des faits

À la suite du dépôt de la demande de la chaîne au CRTC, Vidéotron, Cogeco, Rogers et Bell ont produit des interventions en opposition à la démarche de NATYF TV. « Je m’attendais à l’opposition des principaux câblodistributeurs, puisque les états financiers entrent en ligne de compte », dit Jean-Yves Roux. « Ce sont les arguments utilisés pour la justifier qui m’ont surpris ».

Essentiellement, les câblodistributeurs affirment qu’ils créent déjà des émissions représentatives de la diversité au Québec. Un propos qui choque et d’autant plus dans le contexte actuel, où la défense de la diversité à l’écran constitue un combat essentiel. Avec une documentation exhaustive composée d’études, de reportages et de témoignages, l’administration de la jeune chaîne a ainsi offert une solide réplique à ces interventions à l’encontre de la demande de NATYF TV.

« Avec l’entrée en ondes de NATYF, il devrait y avoir une augmentation de quelques sous de la facture des usager.ère.s », dit Jean-Yves Roux. « Toutefois, les câblodistributeurs annoncent eux-mêmes régulièrement des augmentat ions et on se demande ce qui motive un tel acharnement ».

Mouvement de soutien

« Nous nous trouvons dans une époque charnière où existe une vive tension sociale en ce qui a trait aux enjeux de diversité », dit Kevin Calixte.  « C’est dans ce contexte que nous déposons notre demande et que nous faisons la démonstration de notre préparation comme entreprise télévisuelle ».

Un vaste front réunissant diverses entreprises médiatiques, des associations professionnelles du secteur des communications et des organismes communautaires, a fait l’expression de son soutien enthousiaste à NATYF TV. 

Nous pouvons trouver sur le site du CRTC une longue liste d’interventions en faveur de NATYF TV. On compte parmi ces organismes la Fondation Michaëlle Jean, la Fondation Fabienne Colas et l’Association québécoise de la production médiatique. Certaines personnalités politiques ont aussi pris position en faveur de NATYF TV, comme la mairesse de Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce, Gracia Kasoki Katahwa et différents conseillers d’arrondissement de Montréal. Également, l’auteur et producteur Guy Fournier a fait une intervention en faveur de NATYF TV au CRTC.

Également, une pétition signée par plus de 7,500 personnes a été présentée devant le CRTC. « On a un besoin évident à combler de la part des artisan.ne.s de l’industrie et des communautés culturelles, note le producteur. C’est le temps de faire place à ce vent de changement que nous représentons ».

Nouvelle vision

« Il y a de nombreux.se.s artisan.ne.s de l’industrie qui sont issu.e.s de la diversité et qui brillent par leur talent », souligne Nancy Dubuisson. « Au-delà des rôles qui pourraient être confiés à tant d’acteur.ice.s, il y a une multitude de concepts ou scénarios du meilleur niveau auxquels on gagnerait à ouvrir des portes et c’est ce que nous voulons faire avec NATYF TV ».  

La programmation régulière de NATYF TV comporte en ce moment diverses émissions à portée sociale et culturelle ainsi que des téléséries. Dans tous le cas, un angle reste commun et c’est celui de la diversité, d’une série comme Pure Laine – proposant une intrigue où se rencontrent diverses cultures et mettant en scène Macha Limonchik et Didier Lucien  –  à une émission où s’exprime le débat social comme le Keke Show – un émission  en mode talk-show qu’anime Kevin Calixte.

Nancy Dubuisson souligne que le chaîne gagne actuellement en reconnaissance. « C’est le cas de nos émissions mais aussi de productions, comme le documentaire Le mythe de la femme noire, que signe Ayana O’Shun et qui a fait salle comble aux RIDM (Rencontres internationales du documentaire de Montréal) », dit-elle. D’ailleurs, le long-métrage de fiction Respire de Onur Karaman vient aussi de prendre l’affiche grâce à un partenariat de K-Films Amérique avec NATYF TV. 

« Nous voulons faire de la vraie télévision », ajoute Jean-Yves Roux. « Nous aimerions aussi permettre à une nouvelle génération de reporters, de journalistes à des enjeux de société qui ne sont pas touchés par les médias traditionnels ». 

D’ailleurs, la chaîne a récemment fait l’annonce d’une nouvelle émission d’information animée par Annabelle Picker, NATYF Info +. « Nous sommes prêt.e.s à faire notre entrée en ondes comme chaîne publique », affirme le président et fondateur de NATYF TV.  « L’engagement que nous prenons en est à la fois un envers les médias et la culture au Québec ».

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Alexis Lapointe est rédacteur professionnel et journaliste indépendant. Après l’obtention en 2021 d’un Baccalauréat ès arts de l’Université de Montréal, il travaille actuellement à une série de reportages en relation avec l’art contemporain au Mexique. Également, il s’intéresse à différents enjeux sociaux et en particulier aux thématiques migratoires. Au cours des dernières années, il a produit des textes pour plusieurs médias et en particulier pour la Revue Hispanophone.

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